Une demoiselle de Rochefort
Je suis née, là. A Rochefort. l'année qui a suivi ce fameux film. Ce qui fait que les maisons étaient peintes de ces couleurs éclatantes du film. Une jolie et charmante petite ville.
Et puis mes parents sont repartis, avec ce bébé tout nouveau, parce que le stage de mon père était terminé.
Ils avaient aimé cette ville, cette région, l'homme du Sud et la femme du Nord. Ils se sont renseigné, ils voulaient y vivre.
Et puis, ça n'a pas été possible. 1 an de séparation minimum, pour l'homme déraciné et la femme orpheline depuis peu, c'était inconcevable. Il leur fallait rester ensemble, puisqu'eils n'étaient que 2 avec le bébé. Tous seuls.
Alors, ils sont remontés vers le Nord où le bébé a grandi dans ce village, entouré de champs de blés, de champs de betteraves, de champs de pommes de terre.
Le bébé est devenu une jeune fille qui aimait la ville, le monde, l'énergie et la mer de ses vacances.
Plus elle vieillissait, plus elle se rendait compte qu'elle aimait la mer.
Ses parents l'avaient enmené dans la ville de sa naissance et elle s'était sentie bien. Si bien.
Elle y était retournée avec une amie de La Rochelle, et elle s'était sentie chez elle. Complètement chez elle. Mais elle n'a pas eu le cran de se déraciner dans cet endroit où elle ne connaissait personne, la fille unique de parents souvent seuls. Elle a vécu près de la mer du Nord un moment. mais c'était la mauvaise ville. Les mauvaises gens. Le mauvais travail et les vrais épouvantails.
Maintenant elle vieillit, elle a sa vie, mais toujours cette envie de mer. Pas la mer de ses vacances qu'elle aime pourtant. Pas le Sud où elle se reconnait de moins en moins. Surtout si son amie n'y va plus. Celle qui l'avait réconciliée avec la chaleur, le sable, le soleil brûlant.
Et puis, il y a eu ce bateau.
Il a révélé l'évidence.
J'étais faite pour vivre là-bas. Je ne supporte plus ma région. Je veux vivre près de la mer, et je vis avec un homme qui n'aime que la montagne où j'étouffe.
Je veux que mon regard se perde dans les horizons. La houle. Le vent. Les vagues à portée de main.
Tout cela n'arrivera jamais. Plus jamais je n'aurai le choix.
Je m'apitoie sur moi-même mais ça ne me fait plus aucun bien. Je rumine des scenarii macabres ou idiots qui m'enmènent là où je veux.
Crise de la future cinquantaime, un peu en avance ? Dégoût de ma vie survoltée sans aucun doute ?
Besoin de calme, de repos, d'évasion.
Que je n'aurai pas. Jamais.